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Les Luniens :
Les États-Unis envoient une mission explorer la face cachée de la Lune. Dès leur arrivée, ils rentrent en contact avec des êtres qu’ils appellent « Luniens », et se rendent comptent de leur quasi-similitude avec les humains. Ils envoient au fur et à mesure des rapports décrivant chronologiquement les faits vers la Terre. Parallèlement, l’Union soviétique, fait de même en se rendant au même moment sur la face cachée de la Lune et relate sa rencontre avec des « Luniens ». À la faveur de nombreux quiproquo les deux équipes ne reconnaissent pas les Terriens et croient rencontrer des extra-terrestres. Chacune des parties est ébahie par la maitrise technologique de l’autre, par l’avancement de leur société, de leurs mœurs, de le connaissance, de leur culture et de leur art, poussant chaque équipe à décrire des être exceptionnels desquels il est dorénavant nécessaire de s’inspirer. Quand chaque partie comprend la méprise et que ce ne sont que des humains, des Russes et des Américains, ils quittent la Lune puis la font exploser.
L’amour et la pesanteur :
Revenant de la station orbitale, les pionniers de l’espace racontent leur périple, mais s’étant déroulé exactement comme il a été planifié, il ne suscite guère l’intérêt. Un journaliste demande alors aux aventuriers un récit aux « détails piquants », qui le dirigent vers Joë, un mécanicien de l’équipe. D’un discours simplet et comique au langage peu soutenu, Joë raconte alors son mariage à bord de la station spatiale avec sa femme elle-aussi membre de l’équipage, et en particulier sa nuit de noce. Durant celle-ci, ils n’arrivent pas à consommer le mariage, donnant lieu à des acrobaties et des figures aériennes maladroites, grotesques ou comiques, et des ébats amoureux peu communs et mêmes avortés, provoqués par l’absence de pesanteur.
Le Miracle :
L’abbé Montoire est un homme d’église qui sait trouver les mots et est apprécié pour ses sermons qui redonnent foi à ceux qui viennent à ses messes. Un jour, son ami le Docteur Favreau lui envoie un patient dont la cécité de guerre et la perte de la raison sont irréfutables scientifiquement, car il est persuadé qu’il peut faire un miracle. L’abbé ne se sent pas capable de réaliser cet acte, et ne croit pas à la tentative qu’il va entreprendre. Jean Courtal est présenté par sa mère au prêtre, qui malgré ses refus et ses doutes, redonne la vue et la raison à l’infirme, grâce à une prière. La nouvelle de cette guérison se répand, et amènent d’autres infirmes à se présenter à Montoire, qui au départ les évite, puis tente de les guérir, toujours sans y croire. En effet, Montoire s’interroge sur la guérison de Courtal et rencontre ses supérieurs à ce sujet ; il tente de trouver des explications scientifiques à cette guérison, mais il est obligé d’accepter la réalité d’une guérison surnaturelle qu’il a accompli, d’autant plus que même ses supérieurs au Vatican avalisent ce miracle. Pourtant, malgré les confirmations de l’Église, les confirmations scientifiques, l’abbé Montoire n’arrive pas à accepter cette guérison comme réelle, car pour lui, quand il l’a réalisée, il n’y croyait pas ; pour lui, ce ne pouvait donc pas être un miracle.
E=mc2 ou Le Roman d’une idée :
Enrico Luchesi est un Italien vivant à Rome, destiné à être un homme de lettre, mais quand il découvre les écrits d’Albert Einstein, notamment la relativité restreinte et la formule E=mc², il tombe sous le choc. Il se passionne alors pour les sciences et s’instruit dans ce domaine. De cet formule, il en déduit que si l’énergie est égale à la masse multipliée par le carré de la vitesse, il peut à l’aide de l’énergie, créer de la matière. Il obtient le prix Nobel, pour ces travaux et profite de son voyage en Norvège avec sa femme dans le but de recevoir le prix, pour quitter l’Italie fasciste, qui comme l’Allemagne nazie, présente un risque pour la science moderne. Il rencontre plusieurs scientifiques de diverses nationalités qui l’aident plus ou moins, et se rend à New York. Présenté au président américain en présence d’Einstein, il demande des financements pour pouvoir mettre en application ses recherches. Le président accepte mais demande en contre-partie, à l’inverse, qu’il étudie la possibilité de créer à partir de la matière de l’énergie (de créer une bombe), mais il refuse, comme les autres scientifiques, prétextant que cela est impossible. Progressivement, Luchesi parvient à créer ce qu’il recherche. À partir de rayonnements cosmiques émanant des étoiles, il parvient à matérialiser des atomes d’uranium, puis il parvient à répéter l’opération. Après plusieurs mois de travail, il réussit à matérialiser ces atomes avec une réaction en chaine les multipliant. Tout le cortège de scientifiques décide alors de tenter de matérialiser directement l’uranium sous forme de métal et plus sous forme d’atomes diffus ; le site idéal choisi est la ville d’Hiroshima au Japon. L’opération est un succès et une pluie de matière d’uranium tombe sur la ville, sous forme de fleurs. Malheureusement, la réaction devient incontrôlable et inarrêtable, la ville est entièrement détruite.
Commentaires
Les Luniens : Nouvelle courte montée sur la base d’un quiproquo, qui met en exergue la haine de l’étranger, ou de l’ennemi héréditaire. L’étranger est attrayant, jusqu’à que l’on découvre qu’il nous est opposé depuis toujours, on ne sait pourquoi, et là il devient notre ennemi. L’ouverture d’esprit et la tolérance fait alors place à la violence et au repli sur soi-même.
L’amour et la pesanteur : Nouvelle très courte, comique, sympathique, le style est assez spécial… qui met quand même en avant la naïveté de l’homme (Joë) et finalement de la moquerie de ses coéquipiers qui envoient le journaliste vers lui.
Le Miracle : Courte nouvelle fantastique, d’un prête qui ne croit pas au miracle qui accomplit. Bon… la religion… Après on peut toujours se poser des questions, est-ce que ce qui ne peut être expliqué est surnaturel, ou divin, ou est-ce que le simple fait que ce prête ne croit pas en la possibilité d’un miracle puisse confirmer que c’est impossible… bref, bref… Il faut peut-être remettre dans le contexte de l’après-guerre où les nouvelles ont été écrites (1957), l’Église/la religion avaient plus d’importance/de poids à cette époque.
E=mc2 ou Le Roman d’une idée : Une réécriture pacifiste de l’histoire, pleine de bons sentiments, qui finalement se termine aussi mal que dans la réalité. Malgré la volonté de faire uniquement le bien et éviter la violence, l’idée mène à la destruction. Les scientifiques inversent la réalité, et veulent créer plutôt que de détruire grâce à cette formule, érigée en solution au bonheur et moyen de trouver le paix. La nouvelle embarque les thèmes de la non-violence ou de l’antimilitariste, qui quand même est une terrible désillusion en fin de récit, et laisse entrevoir les dangers des progrès de la science.
- E=mc²
- Pierre Boulle
- 1957
- Presses Pocket (1982)
- 9782266007207