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Leo Kall, chimiste, écrit un livre du fond de la cellule où il est enfermé, dans lequel il raconte la vie qu’il a mené. Il habitait dans la ville de chimie n°4 de l’État Mondial, un régime communiste ayant banni tout capitalisme. Dans cet état, chaque camarade (citoyen) vit dans des appartements avec des murs de verre comportant cameras et micros, tous sont habillés pareils avec un uniforme de travail et un autre de détente (sauf la police), et tous mangent la même chose. Après le travail, Leo rejoint sa femme Linda au métro pour rentrer chez eux, mais il attend avant de lui parler, puisque l’assistante domestique (une aide familiale) doit entendre tout ce qu’ils disent pour en faire le rapport. Parler dans le métro pourrait être suspect, une volonté de cacher quelque chose. Ils ont un garçon, Ossu, huit ans, qui n’habite plus avec eux puis qu’il a intégré les camps de jeunesse (dirigé par l’État), et deux filles plus jeunes Maryl et Laila. Celles-ci, comme tous les enfants, jouent habituellement au jardin d’enfants où elle peuvent s’entrainer à lancer des grenades et simuler des attaques sur une ville afin d’assimiler dès leur plus jeune âge la stratégie militaire. Leo dévoile à sa femme qu’il vient d’inventer une substance, un sérum de vérité, qui s’inocule par intraveineuse, qui force le receveur à dire toute la vérité. Il considère cette substance appelée Kallocaine comme une découverte majeure, car puisque tout camarade appartient à l’État, les pensées de tout individu lui appartiennent aussi. La vérité également, ainsi que le mensonge, et donc un crime contre le régime va devenir impossible. Linda demande s’il va être surveillé, et lorsque Leo dévoile que celui qui va le faire est Edo Rissen, le contrôleur-en-chef de Leo qu’elle connait et avec qui elle a travaillé, il trouve sa réaction étrange si bien qu’il craint que ceux-ci ne nouent une relation illégitime et secrète. Il ne l’aime finalement pas trop, ni lui, ni sa façon de penser, qu’il considère néfaste pour lui, et pour les autres. Régulièrement, il doute de lui, en secret. Ce même soir, ils reçoivent un pli officiel du 7e bureau du ministère de la propagande.
Lors d’une soirée célébrant le départ de jeunes filles vers une autre ville pour équilibrer la population, Leo est présent en tant que surveillant, travail au service militaire et de police que tout camarade doit s’acquitter plusieurs fois par semaine, puis fait une déclaration dans laquelle il sous-entend que certains citoyens pourraient douter ou ne pas croire en l’État mondial, et ne rien dire et continuer à vivre sans rien dévoiler. Il est alors dénoncé, et après une discussion avec Linda qui lui fait encore douter d’elle, il décide de s’excuser publiquement. Dès le lendemain, il fait une première expérience sur un homme, le sujet n°135 proposé par le bureau des sacrifices volontaires (dont le métier est de subir des expériences pour le bien du régime), en présence de Rissen. Le n°135 dévoile alors la vérité profonde de son âme, et révèle qu’il a peur de ce qu’il lui arrive, et qu’il a honte et veut mourir. Leo est content d’avoir pu montrer l’efficacité de son invention, une évolution d’un produit déjà existant qui rendait les cobaye fous, qui gâchait donc du « matériel humain ». L’importance comme la problématique de cette découverte sautent alors au yeux de Rissen, qui estime que l’État doit pouvoir même condamner un innocent si c’est dans son intérêt, alors que la Kallokaine pourrait pourtant dévoiler son innocence. De plus, il estime que passé quarante ans, tout citoyen a quelques chose à se reprocher, même infime. Par la suite, il essaye la substance sur une cinquantaine de personnes, et n’obtient que de dérisoires plaintes sur leurs conditions matérielles ou de problèmes conjugaux. Les deux hommes s’interrogent sur les conséquences de l’usage à haute dose de la Kallokaine. Leo rédige une liste de citoyens mariés pour les prochaines expériences afin de tester leur loyauté face à des mensonges qu’ils connaissent, puis rédige sa lettre d’excuse. En présence de Karrek, le chef de la police, une première femme mariée est interrogée après une injection de Kallocaine, connaissant le désir (inventé) d’espionnage de son mari. Elle délivre alors ses intentions de trahison envers l’état, alors qu’elle venait de le nier juste avant la prise du médicament. Le chef de la police veut l’arrêter, puisque si il n’y a pas de crime, il y a bien une faute, un mensonge à l’encontre du régime ; mais après des protestations de Rissen et de Leo, il accepte de la laisser libre, partant du principe qu’il s’agit d’une expérience.
Une certaine Kadidja Kappori envoie un message à Leo, lui demandant de la rencontrer. Elle se présente chez lui, mais Linda n’est pas là, il fait donc rentrer son voisin pour l’assister comme témoin pour se protéger. Elle lui dévoile que son mari nommé Togo Bahara et elle-même faisaient partie de l’expérience et a dénoncé son mari à la police. Dès lors, il n’a plus confiance en elle et veut la quitter. Elle le supplie de l’aider à le convaincre, et Leo accepte. Il parvient à convaincre le mari avec quelques menaces. Une semaine après, les expériences suivantes permettent à un homme de révéler l’existence d’un groupe de personnes se retrouvant, dont le but n’est pas au départ clairement compris. Les différentes personnes interrogées évoquent un homme appelé Reor, considéré comme un modèle ou plutôt comme un mentor. Ce groupe semble avoir des pratiques étranges comme s’allonger pour faire semblant de dormir avec un couteau, ou se reconnaitre entre eux sans rien dire, mais a surtout l’envie d’insuffler un esprit nouveau dans le régime. À la fin de l’un des interrogatoires, Leo croit voire en Rissen l’une de ces personnes. Rissen et Leo sont menés par les sous-sols devant chef de leur laboratoire, Muili, puis partent au palais de la police, avec tout l’équipement et la Kallocaine. Le voyage en avion vers ce lieu dont la position est inconnue dure des heures. Ils rencontrent le ministre de la police, Tuareg, auquel ils relatent leurs expériences, en présence de Karrek. Rissen minimise cette « communauté » et propose de les relâcher et abandonner toute poursuite, considérant qu’ils sont inoffensifs pour l’État. Mais Leo intervient et le contredit, puisqu’il y voit un danger pour l’ordre social. Après quelques discussions concernant les devoirs du citoyen envers le régime et son utilité, Karrek pense que grâce à la Kallokaine, un « crime de l’esprit » pourrait être inventé et légiféré. Pour ceci, il demande à Leo, d’aller au bureau n°7 de la propagande sous couvert de son erreur récente, pour approcher Lavris, chef du service, afin de convaincre de proposer le projet au ministre des lois, Tatjo. Des expériences sous Kallocaine sont menées devant Tuareg, qui devant les aveux de condamnés dont ils n’avaient réussi à extorquer la vérité, le rendent enthousiaste, estimant que le sérum allait devenir le principal instrument d’investigation du régime.
Leo se rend au bureau de la propagande pour rencontrer la responsable, Kalipso Lavris. Elle semble peut intéressée lorsqu’il lui explique sa trouvaille et évoque la nécessité d’une loi. Il repart mais passe au troisième bureau pour déposer une pétition en vue de mettre en place une propagande avant de convaincre des camarades de s’engager dans les sacrifices volontaires, qui connaissent une pénurie. L’homme qu’il rencontre lui indique que c’est déjà en cours, et lui demande alors s’il peut se rendre utile pour cette cause. Il lui conseille d’aller au Palais du cinéma le soir même avec une autorisation, afin d’assister à un débat concernant l’élaboration d’un film de propagande à dessein des sacrifices volontaires. L’assemblée y évoque les problématiques, les cibles potentielles et préférentielles, mais Leo se sent mal, car il estime que les camarades évoqués ne sont pas respectés ; puis il quitte les lieux quand la conférence est stoppée, alors alors qu’un conflit s’avère être en préparation. À la demande de Tuareg, Leo donne des cours dans le ministère de la police à de nombreux élèves en provenance de tout l’État mondial concernant la Kallocaine. Mais rapidement, il est affecté au sujet de la production de la substance alors que Rissen continue les interrogatoires. Leo veut tout de même en savoir plus sur cette organisation qui l’intrigue, bien que le régime soit profondément ancré en lui. Il obtient l’autorisation de consulter les confessions d’un vieillard obtenue sous Kallocaine au début, au sujet de ces gens. Il apprend alors, également régulièrement par le biais de Rissen qu’une ville pourrait exister proche de la frontière habitée par des gens, vestige de leur civilisation ayant évoluées, tombée sous les bombes et les gaz de l’État, alors que ce dernier inculque à tout le monde que leur mode de vie actuel a toujours existé. Leo apprend l’éventuelle existence de musique et de notes de musique qu’ils ne connaissent pas. Il est un peu ébranlé et étrangement et irrémédiablement intéressé par ces sujets malgré ses convictions tenaces. Par ailleurs, il voit de moins en moins Linda. Un soir, il est convoqué chez Karrek qui lui dévoile que Lavris a réussit à convaincre les législateurs de créer une loi pour condamner les « dispositions d’esprits hostiles à l’État. Puis ils évoquent l’augmentation en conséquence des condamnés, l’utilité de certains en raison de la décroissance de la natalité et les risques futurs lors de leur libérations. Mais Karrek croit que Leo voudrait qu’un citoyen précis meurt plutôt que l’emprisonnement, et lui promet de l’aider au bsoin, se découvrant des intérêts communs. Leo réfute cet envie, mais Karrek confirme son privilège, s’il en a besoin.
Leo est étonné de posséder un pouvoir de vie ou de mort sur n’importe quel citoyen. Mais, en plus de ses insomnies, il est sujet à des cauchemars dans lesquels il voit Karrek, Rissen mais aussi Linda qui le juge, comme il se voit dans cette ville en ruine. Il cultive l’envie de dénoncer Rissen et sa condamnation serait se protéger lui-même ; il interroge Linda concernant leur éventuelle relation, mais n’obtient pas de réponse positive. Il récupère de la kallocaine, pour l’administrer à Linda et obtenir une preuve contre Rissen. Mais le soir même, le sérum de vérité l’oblige à dévoiler l’intention depuis des années de tuer lui, Leo. Au matin, ce dernier rédige la lettre de dénonciation concernant Rissen, en y plaçant tous ses reproches en y apposant le signe distinctif indiqué par Karrek afin qu’il la reconnaisse, mais hésite par la suite à envoyer la lettre. Par ailleurs, Tuareg, le chef de la police, est arrêté après ses confessions sous Kallokaine. Le lendemain, Linda, décide de parler à Leo et lui dévoile le fond de son cœur, ses sentiments ayant évolué à mesure des ses trois grossesses, la première qu’elle considère comme son travail loyal de citoyenne, la seconde qu’elle juge égoïste en en tirant du plaisir et la troisième comme prise de conscience ; elle ne se sent pas bien et voudrait vivre dans un autre monde que celui dans lequel elle vit, qui arrache les enfants à leurs parents, un monde plus humain, où elle pourrait rentrer en contact avec d’autres gens gens pensant autrement, une autre communauté. Leo tombe sous le choc mais comprend sa femme qu’il sent en danger. Par ailleurs, il regrette sa dénonciation de Rissen et tente d’y remédier ; il rencontre Karrek, mais celui-ci refuse, d’autant plus qu’il a déjà été arrêté. Karrek oblige Leo à lui faire une injection de kallocaine, ce qui l’oblige à dévoiler ses doutes sur le régime et son désir de vivre la vie qu’on lui a volé. Il est condamné à mort (il est possible qu’ils n’aient pas eu le temps de mettre en œuvre la sentence avant les évènements qui suivent). Leo rentre chez lui, mais Linda ne revient pas du travail, il ne la reverra plus (il est possible qu’elle soit allée dans cette communauté dans la ville abandonnée). Leo ne se sent pas bien, et ne parvient plus vraiment à pouvoir travailler, il demande à changer d’air en se relaxant sur le toit. Là, il réfléchit et, ébranlé par toutes les révélations et les évènements qu’il a connu se met à douter de l’État et veut enfin un nouveau monde, comme Linda, comme Rissen, comme cette communauté. Cependant des militaires débarquent soudainement, le ligotent et l’emmènent. Par la suite, il s’aperçoit qu’ils ne parlent pas la même langue. L’État mondial a en fait été attaqué et envahi pas son voisin, qui lui aussi est en proie à une forte dénatalité. Rissen sauve sa vie en se mettant au service de ce nouveau régime, l’État Universel, dévoile et donne son invention, la Kallokaine, qui va être utilisée par le nouveau régime. Il reste sous très haute surveillance en prison, en raison de ses trahisons.
Commentaires
Le roman est parfois appelé La Kallocaine et parfois sous-titré Roman du XXIe siècle. Il est impossible dès les premières lignes de ne pas penser que Nous Autres n’ai pu inspirer l’auteur, comme il a pu être influencé par Le Meilleur des mondes d’Aldious Huxley, et influencer 1984 de George Orwell. Kallocaine est un classique et fondateur du genre, dans lequel Boye aborde de nombreux thèmes gravitant autour totalitarisme, comme la surveillance, la peur qui en découle, la propagande, la dénonciation et beaucoup d’autre chose, comme l’amour, la femme et la maternité, l’endoctrinement des enfants et les enfants-soldats, ou celui des adultes…
- Kallocaine
- Karin Boye
- 1940
- Les Moutons électriques, Hélios (2018)
- Traduction par Léo Dhayer
- 9782361835217